vendredi 9 mai 2014

Un nouvel Auster, pour relancer la machine !



Moon Palace, Paul Auster

J’étais persuadée d’avoir lu les principaux romans de Paul Auster ; alors forcément, Moon Palace devait en faire partie. J’étais prête à parier. Hors, par un heureux hasard, une amie me l’a prêté, je l’ai feuilleté et je me suis dit : « Si jamais je l’ai déjà lu, c’est que l’amnésie (ou la vieillesse…) m’a frappé de plein fouet. » En réalité, je n’avais jamais ne serait-ce que mis le nez dans ce roman au titre pourtant familier. Heureusement que je n’avais pas parié, finalement.
Pressée de renouer avec les émotions que ne manque jamais de me donner un bon roman de Paul Auster, je me suis donc plongée sans autre forme de réflexion dans l’espace stellaire et confortable que promet le titre. J’ai été conquise au début. J’ai immédiatement reconnu ce qui fait que cet auteur est un de mes auteurs préférés : un personnage attachant donc on il nous fait partager la vie dans les moindres détails, une tranche de vie emplie de coïncidences et de résonnances. Auster nous fait entrer dans la vie de Fogg en plein virage. La route va alors devenir chaotique, voire carrément dangereuse. J’ai eu du mal à lâcher le livre pendant tous ces épisodes. En plus, comme souvent, le personnage a un rapport assez particulier avec les livres et la littérature. Celui-ci n’est pas un véritable écrivain, mais il pourrait nous le laisser croire. Son rapport aux livres est dès le début hiératique et quasiment charnel (sans trop dévoiler, je peux vous dire qu’il va s’en servir pour meubler son appartement). Ce sont toujours les mêmes motifs qui reviennent, ceux de Paul Auster, et encore une fois je n’ai pas été déçue puisque ces motifs, ces obsessions, je les aime beaucoup.
Passées les cent premières pages, la vie de Fogg prend un nouveau tournant, incarné par une nouvelle rencontre, qui va infléchir le cours de son existence. Qui aurait cru que s’occuper d’un vieil homme en fin de vie réservait autant de surprises et surtout serait source de tant de concomitances ? Encore une fois chez Auster, le hasard ne nous apparait pas autrement qu’une vaste mascarade, destinée à tester les limites du personnage, mais à nous tester, nous aussi. Auster illustre son immense pouvoir de démiurge. Il tire les ficelles et nous embobine jusqu’au bout. C’est très artificiel tout ça ; on peut en être déçu. Mais c’est l’une des prérogatives d’un auteur que de créer des hasards et des coïncidences plus énormes les unes que les autres ; Auster en use et en abuse !
Ainsi on découvre que les liens qui unissent les personnages sont plus proches que ce qu’on pouvait imaginer, et l’histoire nous emporte alors sur des voies trop rapides. Tout s’accélère un peu trop, les coïncidences deviennent trop encombrantes, et les détails avec. Ici réside le paradoxe de cette fin de roman : trop longue dans ses descriptions, trop rapide dans son synopsis. Toutefois cela n’entache pas mon admiration pour cet auteur, qui semble dévider une bobine au fil de ses idées, sans toutefois en perdre la logique (au risque de jouer d’artifices parfois gênants), et n’omet jamais de laisser au fil du texte ces motifs en écho (ici, c’est forcément la lune) que je suis contente de croiser au cours de la lecture.

Tout ceci n’est bel et bien qu’abondance d’artifices (avec toutefois, au premier plan, des aventures fortes et touchantes), mais c’est ce qui me plait dans ce roman. On est en plein dans la littérature, même si ce n’est pas le meilleur roman d’Auster (j’ai en tête Sunset Park, dans lequel les aventures des personnages sont plus plausibles et donc plus fortes). 

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