vendredi 12 octobre 2012

Hommage à la Norvège


Hommage à Anne B. Ragde

Non non, elle n’est pas morte cette dame, au contraire, et j’espère qu’elle va continuer à sortir plein de livres de sa froide Norvège, plus passionnants les uns que les autres.


Pour commencer dans le froid, je vous parlerai de Zona Frigida, premier roman que j’ai lu de cette auteur. Ça a été un coup de cœur. Je sais quand un livre va me plaire vraiment beaucoup parce que je le lis vraiment très vite, par rapport à d’autres livres en tout cas. Celui-là, il était difficile de me l’enlever des mains, donc bon… Au premier abord, l’histoire peut paraître étrange : c’est celle d’une jeune femme un peu pommée, un peu à les Despentes, qui part en croisière dans un lieu atypique : dans l’Océan Glacial Arctique. Elle prend place à bord d’une espèce de chalutier aménagé, accompagnée d’une douzaine de personnes, équipage inclus, et traverse les glaces. Glaces des mers, mais aussi des hommes. Elle rencontre des ours, des phoques, des fous et des nounours. Bon dit comme ça ça ne donne peut-être pas vraiment envie… Mais il y a quelque chose dans la manière de raconter, d’écrire, dans le rythme de l’histoire qui fait qu’on est pris dedans, un peu comme un bateau dans les glaces, sauf qu’on y est bien, dans la mer d’Anne B. Ragde (pourquoi ce B. d’ailleurs, qui rend son nom limite imprononçable, une sorte d’éternuement, je ne saurais pas vous dire. Et je n’ai pas envie de chercher parce que finalement, les atchoums, ça fait son charme). D’autant plus qu’il y a tout de même des intrigues assez prenantes, qui laissent les pages se tourner plus vite qu’on ne croirait. Une très bonne surprise !

Suite à ce grand plaisir de lecture, je me suis attaquée, quelques semaines plus tard, à sa trilogie. Un peu impressionnant de s’attaquer à une trilogie, même si chacun des livre ne dépasse pas les 400 pages. M’enfin tout de même…
Me voilà donc plongé dans l’univers de la morgue… j’ai été très déstabilisée… Mais on se rend compte, en continuant de tourner les pages, que ce ne sera pas uniquement cela, le roman. En fait, la morgue, c’est l’univers du premier des frères de l’histoire. Ils sont trois, et l’un est croque-mort. L’autre est décorateur de vitrines homosexuel jovial et raffiné, et le troisième est éleveur de porcs. Un sacré tableau ! Ces trois là ne se voient autant dire jamais, chacun à ses occupations. Mais parfois la vie nous rattrape, dans leur cas c’est même plutôt la mort, et ils se retrouvent au chevet de leur mère. Lorsque celle-ci vient à mourir, un certain nombre de secrets sont révélés, dont l’existence de Torrun, la fille de Tor. Je ne vous en dit pas plus, mis à part le titre du premier de la série : La terre des mensonges.
Enfin si, encore quelques mots, pour vous donner envie : les vies de tous ces personnages fort différents nous sont racontées, qu’elles soient parallèles ou entrecroisées, c’est fort ou léger, dur ou mignon ; tous les sentiments se croisent dans ce livre un peu chorale, mais assez peu ennuyant (exceptés quelques passages un peu longs, je le concède…).

La suite est formidable aussi : La ferme des Neshov ; c’est le nom de toute cette petite famille. Maintenant qu’ils se sont retrouvés, qu’ils sont liés par Torrun, cette jeune femme pleine de bonne volonté, les personnages vont se croiser, échafauder des projets, tenter de faire revivre cette ferme qui part à vau-l’eau, les porcs et ses occupants avec. Encore une fois, plein de sentiments, et une lecture qu’on a du mal à abandonner. C’est fort et frais à la fois, ça fait du bien en fin de journée.

Pour ce qui est du dernier,  je ne l’ai pas encore lu, mais on m’a dit qu’il n’avait pas la qualité des deux autres. A voir !

Les Heures souterraines


Les heures souterraines, Delphine de Vigan

Mathilde et Thibaut, chaque jour depuis bientôt un an, évoluent dans leur vie comme dans un souterrain. Ils se cognent au quotidien, aux aspérités de leurs relations, aux difficultés de trouver une issue à ce qui les détruit peu à peu. Ce sont deux destins croisés, dont on se demande à chaque page s’ils se croiseront pour de bon.

Mathilde est mère célibataire ; on apprend au cours du roman qu’elle est veuve. Elle élève seule ses trois fils, des amours de fils. Thibault est médecin urgentiste. Chaque jour il rencontre des dizaines de patients, plus ou moins souffrants, plus ou moins en détresse. Mais ce qui préoccupe le plus nos deux personnages, ce n’est pas ce quotidien difficile ; c’est plus et pire que cela. Mathilde souffre de son patron, qui après avoir fait d’elle son bras droit, la mutile, la détruit un peu plus chaque jour. Thibault, lui, va aussi se mutiler, en rompant avec sa petite amie.
Avec le portrait de Mathilde, en focalisation interne (comme celui de Thibault d’ailleurs), on voit se dessiner un portrait peu glorieux de l’entreprise, de ses souffrances, de ses coups bas. C’est finalement une lutte de tous les instants entre les forts et les faibles, les soumis et les dominants. Mais le plus dur, c’est que les rôles changent, caractères et caprices de chacun ayant une influence sur ce microcosme chaotique. Mathilde souffre chaque jour, et peut-être plus particulièrement en ce 20 mai, jour qui nous est conté, puisqu’elle sent que quelque chose va changer dans sa vie, mais que tout tarde à venir. Les espoirs se crèvent un à un comme des bulles de savon.

Pour tout vous dire, tout au long du roman, j’ai espéré que Mathilde rencontre Thibault. J’ai espéré, espéré, à chaque page je me disais « c’est pour bientôt », ils ont tout pour être ensemble, leur douleur et leur impuissance face au monde donne envie d’une rencontre, une rencontre qu’on pense salvatrice pour tous deux. J’ai tourné les pages, et oui ils se rencontrent… mais dans quelles circonstances, je ne le dirai pas. J’en ai déjà trop dévoilé.